Ce qu'il se passe.
Les Tunisiens balancent entre liberté et autorité.
Rembobine Amine, quel choix !
Clairement. 10 ans après avoir fait la révolution et 1 an après la dissolution du Parlement par l’actuel président Saïed, les 9 millions d’électeurs tunisiens votaient hier pour une nouvelle Constitution. Le texte, proposé par ses soins, lui donnerait les quasi pleins pouvoirs.
Atta, rappelle-moi cette révolution ?
Yep. Le 14 janvier 2011, après 4 semaines de manifestations, le président autoritaire Zine el-Abidine Ben Ali, au pouvoir depuis 87, s’enfuit en Arabie saoudite. C’est le premier des Printemps arabes, ces soulèvements populaires qui ont fait tomber, vaciller ou au moins changer le visage des pays du Maghreb et du Moyen-Orient. Mais la Tunisie est spéciale car elle fut la première et la seule à être restée une démocratie après les Printemps arabes.
Et depuis ?
Les Tunisiens ont gagné la liberté mais les espoirs d’une vie économiquement meilleure sont douchés. Aujourd’hui, le chômage touche 40 % des jeunes, le pays compte 4 millions de pauvres sur 12 millions de Tunisiens, et les richesses par habitant ont diminué de 15 % en 10 ans.
Pourquoi ?
Le truc, c’est qu’Ennahdha - le parti islamo-conservateur qui domine la vie politique depuis la révolution - a fini par incarner les dérives de la classe politique que la révolution avait chassée. Il s'est saisi de tous les échelons du pouvoir, au point que ses opposants l’ont accusé de capter les ressources du pays. D’où l’élection du président Saïed.
Justement, ce nouveau Président, c'est qui ?
Un électron libre, sans parti. Un juriste spécialiste du droit constitutionnel, qui à l’inverse d’Ennahdha, symbolise une forme de droiture. Les Tunisiens l'ont d’ailleurs élu à la présidence le 23 octobre 2019, à plus de 72 % des voix au second tour. Mais, depuis qu’il a dissous le Parlement il y a pile un an, des voix s’inquiètent de sa dérive autoritaire.
Ah oui, j'ai l'impression.
La nouvelle Constitution rendrait le Président quasi intouchable : il ne pourrait pas être remercié, il pourrait prolonger son mandat et bénéficierait d’une immunité totale pendant la durée de ses fonctions.
Et maintenant ?
Pour beaucoup, la nouvelle Constitution va être adoptée car les oppositions la boycottent, et une grande partie des Tunisiens sont concentrés à survivre plutôt qu’à voter. Réponse fin août.