Ce qu'il se passe.
Les Kazakhs se révoltent.
Rembobine Aylin, j'ai entendu ça.
La semaine dernière, des manifestations ont éclaté au Kazakhstan. Au départ, les citoyens ont protesté contre la hausse brutale - + 60 % en quelques jours - du prix du carburant, mais le mouvement s’est vite transformé en émeutes contre le pouvoir en place et ça a dégénéré : au moins 164 personnes sont mortes, plus de 2 000 ont été blessées et près de 6 000 arrêtées.
Redis-moi le Kazakhstan.
C’est un pays d’Asie centrale, ici, d’environ 19 millions d’habitants, grand comme 5 x la France, dirigé par un régime très autoritaire et corrompu depuis son indépendance de l’URSS en 1989. Il est très riche en pétrole, en gaz, en charbon et en métaux rares, c’est le 1er producteur d’uranium - nécessaire au fonctionnement des centrales nucléaires - et le 2e centre de minage de Bitcoins du monde. Il entretient des relations commerciales fortes avec la Russie, son 1er fournisseur, mais aussi avec l’Union européenne, son 1er partenaire commercial, et les US, le 2e investisseur dans le pays. Sa religion dominante est l’islam, 70 % de son peuple est kazakh et 1/5e est russe.
Et ces manifs alors ?
La situation est rapidement devenue hors de contrôle après la 1re manif provoquée dimanche 2 janvier par la hausse des prix du GPL, le principal carburant là-bas. Jusqu’ici, ses prix étaient fixés par l’État, mais ils ont été libéralisés au 1er janvier et se sont envolés dans les jours qui ont suivi. Les protestations se sont étendues à tout le pays et dès le mercredi, près de 5 000 personnes ont défilé dans les rues d’Almaty, la capitale économique. Elles ont mis feu à la mairie et à la résidence présidentielle, et la police a tiré sur les manifestants.
Pourquoi ça a dégénéré ?
Parce que les Kazakhs remettent en cause le modèle social inégalitaire et le régime politique autoritaire en place depuis plus de 30 ans. Oui, car jusqu’en 2019, le pays était présidé depuis 1989 par Noursoultan Nazarbaïev, 81 ans, qui avec son clan familial est soupçonné de corruption chez lui et par nombre de gouvernements occidentaux. Et même s’il a laissé le pouvoir à Kassym-Jomart Tokaïev il y a presque 3 ans, c’est lui qui, en tant que chef du Conseil de sécurité, a continué à prendre toutes les décisions importantes du pays.
Comment le pouvoir a réagi ?
Le président Tokaïev a licencié son gouv et a annoncé qu’il destituait Nazarbaïev de son poste, tout en organisant une forte répression. Il a décrété l’état d’urgence dans tout le pays, instauré un couvre-feu, coupé internet et les téléphones. Il a aussi demandé l’aide de la Russie qui a envoyé ses forces dans le pays pour "stabiliser la situation".
Ça lui profite, non ?
Yep, cette intervention au Kazakhstan permet à Moscou de maintenir son influence dans la région face à la Chine, qui a de plus en plus de poids grâce à ses investissements massifs dans le pays, mais aussi face à l’Occident qui s’inquiète du pouvoir russe.
C'est-à-dire ?
L’UE et les US ne voient pas d’un bon œil les pressions de Poutine qui, avec ses 100 000 soldats russes massés aux frontières de l’Ukraine, menace d’envahir le pays pour le maintenir dans sa zone d'influence et met ainsi la sécurité du continent européen en danger. Un sommet US-Russie a d’ailleurs lieu depuis hier et continue aujourd’hui pour discuter de la situation ukrainienne.
Et au Kazakhstan, on en est où ?
Vendredi, le président Tokaïev a rejeté toutes négociations avec les manifestants tout en autorisant les policiers à tirer "sans avertissement" sur eux. Hier, le calme était revenu, mais la situation restait tendue.
Pssst. *C'est le slogan des manifestants qui demandent le départ du Président.